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REGISTRES DU BUREAU
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vert, dont l'ung l'ataignit au col et l'autre à la main; mais, la grace à Dieu, il n'est demeuré offence dc l'ung ny de l'autre, ayant seullement la peau ung peu froissée : dont j'ay grande occasion de louer Dieu de l'avoir ainsy miraculeusement préservé et qu'il soit au jour d'huy en la mesme bonne santé que si la chose ne fut advenue.
"De quoy j'ay estimé bien requis de vous ad­vertir, de peur que si l'on faisoit courir autre bruict de mond. Frere que ce que je vous mande de la pure vérité, vous ne le croyez; mais la faittes en-
tendre à ung chascun telle qu'elle est contenue cy dessus t1'.
"Donné à Lezigny'2', le dix neuf"10 jour de Juing 1573.»
Ainsi signé : "CHARLES".
Et au dessoubz : "Brulartd.
Et au doz est escript ce qui s'ensuict : A noz trés chers et bien aînez les Prevost et Eschevins de nostre bonne Ville de Paris.
CLXI. — [Ordonnance pour
1" juillet i573.
#e par le Prevost des Marchans et Eschevins de la Ville de Paris. «Il est enjoinct à tous marchans de draps, filz et passemente d'or, d'argent et de soie, camelotz à undes et sans undcs, samys, demi ostades, serges et petitz camelotz dictz droguetz d'Amyens, bons ba-zins, fustaines, maroquins de toilles coulleurs, cha­mois, buffes, thoilles de Hollendes, de Cambray et baptistes'3>, d'apporter ou envoyer, dans le quator-zeiesme jour de Juillet prochainemant venant, pour tous delaiz et pour le plus tard, au bureau pour ce ordonné en l'Hostel delad. Ville, toutes etchascunes
LA FERME DEs] DRAPS d'ûR. (Fol. 55 v°.)
les marchandises qu'ilz auront subjettes au paiement des droictz d'entrée, n'a gueres mis sus par le Roy, pour y estre lesdittes marchandises marquées de la marque pour ce aussy ordonnée, si mieulx les mar­chans auxquelz elles appartiendront n'ayment que l'on les aille marquer en leursd, maisons, auquel cas ilz seront tenuz en advertir Loïs Crétin, fermier des­dictz droictz M, trois jours après laditte publication, affin que ledict Crétin ayt temps suffisant pour faire lesdittes marques : sur peine de confiscation desd, marchandises qui se trouveroient en leur possession puis après non marquées.
(1) La missive royale atténue volontairement la gravité du péril où le duc d'Anjou fut exposé. Voici, d'après une relation contem­poraine, des détails plus circonstanciés et qui paraissent exacts : «Le mesme jour (samedi i3 juin) Ie duc d'Anjou vint dedans la «mine qu'ils (les assiégeants) auoyent faite à la Vieille Fontaine, ou estant reconnu par un soldat de la ville, qui estoit dedans retiré, «luy lira une harquebousade chargée d'une balle et de quelques dragées. Toutes fois un gentilhomme voyant le feu au serpentin, se mit «au deuant de Monsieur, et fut tué, el Monsieur fut blessé de quelques dragées, tant derrière l'oreille qu'au bras, près de la main.» (Mémoires de l'Estat de la France sous Charles IX, t. II, p. 276 de la 2" édilion, Meidelbourg, M.D.LXXXIII.)
(s) Lésigny-en-Brie, canton de Brie-Comte-Robert et arrondissement de Melun (Seine-et-Marne).
(3) Camelot : étoffe faite non pas en poil de chameau, ainsi que l'apparence étymologique semblerait le faire croire, mais en poil de chèvre d'Angora (seil el Kemel). En effet, Ie camelot ou Camelin figure parmi les étoffes de prix, témoin ce passage où Joinville, chapitrant Robert de Sorbon,s'exprime ainsi : «Vous estes filz de vilain et de vilaine, et avez laissié l'abit vostre pere et vostre mere, «et estes vestu de plus riche Camelin que le roi n'est." (Littré, Dictionnaire de la Langue française, s. v.) Mais déjà les Bollandistes avaient rejeté, il y a près de deux siècles, l'opinion qui fait dériver camelot de chameau, (AA. SS. Maii, tome II, p. 88.) — Camelot à undes ou sans undes, Calandre ou uni.
Samys : samis, étoffe fort riche, lamée d'or et d'argent.
Demi ostade ; d'après Du Cange, l'ostade serait la même étoffe que Vestame.
Serge : étoffe de soie ou de laine croisée.
Droguet : étoffe de bas prix, espèce de serge moitié fil et moitié laine, ou tout laine.
Bons baziiw (qui serait mieux bombasins, bas-lalin bombacinum, italien bombagino) : aujourd'hui basin, étoffe croisée dont la chaîne est de fil et la trame de coton.
Fustaine : étoffe de fil et de coton, fabriquée originairement à Fushlah, l'un des faubourgs du Caire.
Maroquin : cuir de bouc ou de chèvre corroyé à la noix de galle ou au sumac.
Baptiste, aujourd'hui batiste : toile de lin très fine et très blanche, ainsi appelée du nom de son premier fabricant auquel la ville de Cambrai a érigé une statue. On croit que le tisserand Baptiste a vécu au .tin* siècle, au village de Cantany en Cambrésis.
(4> Lodovico Cretini, Florentin, avait été déclaré adjudicataire de la ferme sur les draps d'or et de soie, par Délibérations des 7 ct 16 mars précédent, ensuite du refus des marchands parisiens de prendre cette charge. Voir ci-dessus principalement les articles CXII, CXV, CXXXVUI et CXLVIII.